Comme ça, pour rien, juste parce que ça n'a rien à faire là.
*
Là, au milieu de cet océan déchainé et de ces vagues dévastatrices je ne me suis jamais sentie aussi seule. Même avec Lock, quand on étaient séparés, je sentais sa présence quelque part, mais là, plus personne. Juste cet horizon beaucoup trop vaste et cette mer immense qui m'étouffe de sa panique. Un refus de la réalité s'impose, Lisa se perd dans les remous et personne ne viendra la secourir.
L'espoir s'en va et le regret fait face, comme dernier recours à la chute qui pointe le bout de son nez. L'illusion s'envole vite et moi, je me noie sous les yeux de la mer, ces bateaux qui ne bougeront pas. C'est à ce moment là que Lisa se demande pourquoi elle n'a pas apprit à nager.
Des lunettes rondes et épaisses me reviennent en mémoire, une casquette bleue - comme devrait être cet océan qui veut m'emporter avec lui - et des fleurs, des roses rouges. Un léger sourire me vient tandis qu'une nouvelle vague s'abat sur moi.
C'est bien beau d'être prise à l'intérieur d'une vague. Une expérience interessante, à ne pas renouveler. Le soleil s'est couché depuis longtemps, seuls quelques éclats de lumières subsistent dans l'air. Mon souffle se fait court, c'est une agonie lente, celle du naufragé, celui qui s'est perdu en pleine mer. Moi je me suis perdue tout court, je ne retrouve plus l'entrée de ma vie depuis longtemps. C'est dur de vivre pas vrai? On voudrait la confirmation que nos convictions sont vraies, que ce ne sont pas des illusions comme toutes celles que l'on s'invente. On espere qu'on n'aura pas - encore une fois - à se prendre la vérité au visage.
Le rideau tombe et les Bravos retentissent une fois de plus, le pantin à jouer son jeu et le public est content, il a pu se moquer d'une bête en cage, celle qui ne vivra jamais. La comparaison est bonne, pas trompeuse. Ivres de joie, ils s'inventent un monde où eux seuls ont le droit d'exister, et d'où sortent des monstruosités interdites. C'est lorsqu'on se prive de quelque chose qu'on en a le plus envie, eux-même en font l'expérience de par leur désir de voir ce qu'ils ne sont pas censés être. Je suis la bête en cage, celle qui fait rire les spectateurs de par ses différences et sa maladresse. Et le coeur qui bat, les yeux fermés, ca se déchire à l'intérieur, cette haine atroce.
Quelque part un cri retentit - ce n'est sûrement pas moi que l'on apelle - et la nuit tombe pendant que prisonnière de ces rouleaux déchainés, je tente en vain de garder pied. L'eau me fait suffoquer, la bouche amère de regrets, ceux qui m'ont poussés à disparaître, je coule à pic sans d'autre espoir que l'on me retrouve à travers cette tempête.
"Et on continuera encore d'évoquer l'appel de la mer comme celui de la délivrance."
La mer, cette traîtresse.